A M. Paul Gaimard.

Tu as gravi au sommet de l'Hekla. De là tu voyais
cette large contrée où l'eau limpide des fleuves coule
à travers la vaste prairie, et s'enfuit vers la mer,
tandis que Loki reste enchaîné dans les entrailles
profondes des montagnes de glace. Ne te semblait-il
pas alors que l'Islande était un beau pays á voir ?

Tu as voyagé avec le cheval agile à travers les vallons,
où la voix des cascades écumantes semble parler
aux habitants des pics escarpés, où les troupeaux
de moutons couverts d'une longue laine paissent au
flanc de la montagne. Ne te semblait-il pas que l'Islande
offrait quelque joie á ceux qui l'habitent!

Tu as traversé les longues plaines brûlées par les
volcans. Tu as vu le beau lac pur auprès duquel notre
célèbre assemblée nationale siégeait autrefois avec sa
fière et libre constitution. Maintenant les tentes où
elle venait s'abriter ont disparu. L'enceinte de lave
est silencieuse et morne. Ne te semblait-il pas que
l'Islande, privée de son assemblée nationale (althing),
présente un triste aspect?

Te voici maintenant sur le sol de Copenhague; tes
amis d'Islande viennent te saluer. Nous savons que
tu nous aimes; car tu es Francais, et nous sommes
un peuple de liberté. Le même esprit nous anime
encore, quoique les peines paralysent nos forces et
arrêtent nos pas. Nous voulons chercher un adoucissement
à nos regrets en puisant a la source de la science.

La science soutient nos actions, accroít nos forces
affermit notre volonté, ravive notre espoir, égaye
notre esprit et répand le bonheur dans notre pays;
et voilà pourquoi nous devons remercier ceux qui
s'efforcent d'allumer et d'entretenír la flamme céleste
sur les sommets sacrés de la science.

Nous te devons ces remercîments,  à toi qui, dans
ton infatigable persévérance, n'as jamais cessé d'étudier
les secrets de la nature. Salut à toi Paul, honneur
à toi! Jamais un hôte plus cher ne prit place parmi
nous. Que le Tout-Puissant aplanise ta route!
L'Islande gardera longtemps ton souvenir.

 

Traduit par: Xavier Marmier